Tu t’éloignes tranquillement vers l’horizon.
T’es sur ton p’tit voilier pis t’as un peu peur. T’as d’la misère à respirer, t’essaies mais ça t’essouffle.
Tu sais pas trop comment faire pour que ta barque commence à voguer.
Tu sais pas trop non plus dans quelle direction naviguer.
Tout ç’qui a autour de toi, c’est d’l’eau pis du vide.
Ça t’intimide.
Tu m’dis qu’t’as jamais mis l’pied sur un bateau.
Mais aujourd’hui, tu dois traverser l’océan tout seul.
J’pense que c’est ça qui t’angoisse le plus.
L’inconnu.
Pis avoir à l’affronter avec l’aide de personne.
Le voyage, c’est la partie la plus difficile. Parce que, arrivé à destination, tu vas être bien. Encore mieux qu’ici.
Promis.
Moi j’reste de mon côté d’l’océan. Mes bagages sont encore vides, j’ai pas grand chose à mettre dedans.
Toi, tes valises sont pleines.
Pleines d’histoires et de souvenirs.
Tellement pleines que ton vécu déborde même un peu.
Ça m’fait d’la peine de t’voir partir, mais j’me dis qu’au moins on va s’revoir.
C’est juste qu’y’est temps qu’tu racontes tes histoires à ceux qui t’attendent de l’autre côté d’l’horizon. À ceux qui ont pas eu la chance d’les vivre avec toi, mais qui brûlent d’envie d’les entendre.
Ici, on les aime, tes histoires, mais on les connaît pas mal par cœur.
Y’est temps qu’tu t’bâtisses d’autres souvenirs.
Sans moi.
Sans nous.
Tu m’les raconteras quand mes propres bagages seront remplis.
Pas tout d’suite. Un jour.
Entre temps, j’te garde avec moi dans ma tête.
Je l’sais qu’c’est p’t’être pas possible, mais j’aimerais ça qu’tu m’envoies une carte postale une fois là-bas.
Pour me dire que t’es correct. Que tu t’es bien rendu.
Pour que j’arrête de m’inquiéter.
J’pourrais la coller su’l frigo, juste à côté d’ta photo.
J’m’excuse, je l’sais que j’parle beaucoup.
Merci d’être venu faire un tour sur mon chemin.
Maintenant, c’est l’heure du départ.
Lève l’ancre.