Les traîneries du samedi

J’t’avertis tout d’suite : j’suis pas d’même.

J’suis pas la fille que tu vas trouver dans les bars. Celle à qui tu vas pogner une fesse en passant su’l dancefloor juste pour marquer ton territoire. Celle que tu vas t’ramener à la fin d’la soirée comme un trophée pis domper l’lendemain matin sans lui offrir un café.

J’suis pas un numéro d’téléphone de plus dans ta collection.

J’suis pas non plus la fille qui faisait partie d’la gang des cool-populaires-parfaits au secondaire. Celle qu’y’a été élue reine du bal après avoir été la reine des corridors d’l’école pendant cinq ans. Celle que tout l’monde aimait parce que ç’tait elle la plus belle la plus fine la plus drôle la plus talentueuse la plus toute dans l’fond.

J’suis pas la fille qui réussit toujours-tout-tellement-trop bien. Celle qui a cent-pour-cent dans tous ses examens. Celle qui a une aura d’succès qui flotte autour d’elle partout où elle met les pieds. Celle qui a juste à lever son p’tit doigt pour que les problèmes se règlent ou qu’tout soit parfait.

J’suis pas la fille qui fait du sport dans ses temps libres. Celle qui va faire du jogging pour se changer les idées quand ça va pas. Celle qui a un corps d’enfer avec pas d’graisse entre la peau pis les os, qui pèse plus que moi mais que t’sais « on s’en fout, c’est juste du muscle anyway. » Celle que tu vas rencontrer au gym pendant son training quotidien course-bras-abdos-cuisses.

J’suis pas non plus celle que tu vas remarquer en premier en marchant dans la rue. Celle qui ressemble à ton actrice hollywoodienne préférée. Celle qui fait du yoga trois fois par semaine même des fois quatre. Celle qui mange sans gluten, qui s’nourrit exclusivement avec des smoothies verts pis qui fait l’régime detox à Gwyneth Paltrow.

J’suis pas la fille qui a soif d’aventures. Celle qui est game de faire n’importe quoi. Celle qui saute en parachute parce que l’bungee c’est rendu quelque chose de banal. Celle qui fait ses bagages la veille d’un voyage en pack sac. Celle qui s’rend à l’autre bout du monde su’l pouce.

Mais j’suis pas non plus la fille que tu vas accompagner au magasin à toutes les fins d’semaines. J’suis pas celle qui prend l’temps d’se maquiller à tous les matins. Celle qui voit la différence entre les fonds d’teint NARS, Make Up For Ever pis Clinique parce que de toute façon y’a ma couleur de peau dans les trois marques.

J’suis pas la fille ambitieuse qui passe son temps à travailler pour avoir une carrière impressionnante. Celle qui rêve d’aller étudier à Harvard. Celle qui a quinze diplômes, dont trois doctorats pis deux maîtrises.

Pis j’suis pas non plus la fille qui a l’instinct maternel ben fort. Celle qui rêve d’une guirlande d’enfants dans sa maison en campagne. Celle qui attire les flos comme des aimants juste en prononçant deux mots pis en souriant.

J’suis pas ces filles-là, j’suis pas comme elles.

J’suis parfaitement imparfaite.

Pleine de défauts, mais pleine de qualités aussi. J’suis comme tout l’monde dans l’fond.

Mais en même temps non. J’suis différente parce que j’suis moi.

Pis c’est l’mieux que j’puisse te donner.